Suite aux déclarations estivales sur les prétendus cadres qui « abusent de l’assurance chômage » (1), propos en résonnance avec ceux tenus par le ministre François Rebsamen en 2015 (2), un état des lieux semble nécessaire !
L’idée proposée par le député de la majorité Aurélien Taché (LREM), rapporteur sur le volet assurance chômage de la loi « Liberté de choisir son avenir professionnel », est « d’instaurer une dégressivité à partir de six mois ou forfaitiser le revenu », car selon lui, « la justice sociale ce n’est pas de couvrir pendant deux ans des gens qui ont de très hauts revenus et pourraient retrouver un emploi ».
Pour mettre fin au mythe du cadre chômeur aux Bahamas, voici les chiffres clefs sur le chômage des cadres :
- Seulement 900 personnes touchent l’allocation maximale (7 454 € brut par mois soit 6560€ net), cela représente 0,03 % des bénéficiaires en 2017 ;
- Le taux de chômage des cadres était de 3,3 % en 2017 ;
- Les cadres ne représentaient que 7 % des allocataires indemnisés en 2016 ;
- 95 % des allocataires perçoivent une allocation de moins de 2 275 € brut par mois ; – En 2015, les cotisations des cadres apportent 42 % des cotisations chômage (33,4 milliards en tout) soit 14,1 milliards et perçoivent 15 % des allocations c’est-à-dire 4,7 milliards. Ce qui veut dire qu’il y a environ 10 milliards des contributions des cadres qui financent la solidarité ;
- Le taux de remplacement (3) pour une personne au SMIC est en moyenne de 79 % contre 64 % pour un salarié qui gagnait environ 3 000 euros net par mois (2016)
Ces chiffres démontrent d’une part que le fameux cadre fraudeur qui touche une allocation de plus de 6 000 euros par mois pendant deux ans est un cas extrêmement marginal, voire totalement inexistant ; et que d’autre part, l’encadrement est la population qui contribue le plus à l’équilibre financier du régime d’assurance chômage, tout en bénéficiant d’une protection moindre.
Enfin, il est important de préciser que même si les contributions salariales au régime d’assurance chômage ont récemment été supprimées et remplacées par la contribution sociale généralisée (CSG), l’encadrement reste la population qui participe le plus au financement du régime, car la ou les contributions salariales étaient plafonnées, la CSG (assise aussi sur le salaire) ne l’est pas.
Article paru dans Le Bulletin confédéral n°54 (Regards Emplois, septembre 2018)
(1) « L’accès à l’Assurance chômage doit être durci » Nicolas BOUZOU l’express 15 août 2018, « Chômage : un député LREM veut « instaurer une dégressivité pour les hauts revenus » Le Parisien 22 août 2018
(2) « La protection élevée des hauts revenus des cadres au chômage était unique au monde et qu’il serait bon de baisser le niveau d’allocation aux alentours de 3 000 euros » Le Monde 21 mai 2015
(3) Rapport entre le salaire journalier de référence net ayant permis l’ouverture de droit et l’allocation journalière nette