A l’heure où s’ouvre le débat parlementaire, il est urgent et indispensable que la loi PACTE inclue les mesures structurelles mettant les marges retrouvées et les gains de productivité de nos entreprises au service de davantage d’investissements. C’est d’autant plus nécessaire dans le contexte de besoins accrus pour financer la transition énergétique et écologique.
Il faut restaurer la primauté du long terme sur le court terme financier, ce pour quoi l’application volontaire de la RSE (Responsabilité Sociale d’Entreprise) se montre insuffisante.
La situation de l’emploi et notre cohésion sociale s’en trouveront grandement améliorées.
Des études récentes* confirment les effets de l’adoption par les dirigeants des grandes entreprises françaises de la stratégie de gestion consistant à maximiser la création de valeur à court-terme pour leurs actionnaires en versant des dividendes importants. L’étude Henderson d’août 2018 souligne le versement de dividendes record par les sociétés françaises. Elle permet également de constater que les dividendes versés par les sociétés allemandes sont inférieurs de 15 % à ceux versés par les entreprises françaises, soit 40 % de moins une fois corrigé du poids relatif des économies allemande et française.
La priorité donnée aux politiques de dividendes très élevés se fait au détriment de l’autofinancement des investissements expliquant par exemple le retard de robotisation de notre industrie. C’est également un facteur d’étouffement de toute la chaine de sous-traitance pour l’essentiel constituée de PME et d’ETI. Enfin, cela accroit les délocalisations en pays low-cost d’activités industrielles et tertiaires mais également maintenant de travaux qualifiés d’ingénierie, l’ensemble pénalisant la croissance française.
Pour la CFE-CGC, la réponse structurelle à ces dérives nuisibles est d’améliorer en profondeur la gouvernance des entreprises.
L’ajout de la notion d’intérêt social dans le code civil ne sera que de faible portée. Les salariés étant la partie la plus intéressée au long terme de l’entreprise, il faut ajouter que l’entreprise doit être gérée dans l’intérêt équilibré de ses deux parties constituantes que sont ses associés/actionnaires et ses salariés. L’inscription de sa raison d’être dans les statuts devrait être obligatoire et non facultatif. Une instance pluridisciplinaire, non limitée aux représentants des chefs d’entreprise comme c’est le cas pour le code AFEP Medef, devrait être chargée de rédiger un code de gouvernement d’entreprise plaçant l’intérêt social au cœur de la gouvernance.
Une représentation accrue des salariés dans les organes de gouvernance des sociétés employant plus de 1000 salariés est indispensable pour mieux prendre en compte les enjeux de long terme, de nombreux chefs d’entreprise sont maintenant ralliés à cette mesure. La loi devrait prescrire une proportion d’au moins un tiers d’administrateurs salariés dans les conseils de toutes les sociétés, y compris celles par actions simplifiées (SAS).
L’actionnariat salarié, qui est le pan le plus stable du capital des entreprises, doit être développé mais cela ne pourra se faire sans la capacité réelle des salariés actionnaires à exprimer leur position sans préemption par les directions. Il est donc indispensable que les conseils de surveillance des fonds d’actionnariat salarié comportent au moins 2/3 de leurs membres représentant les salariés.
Une telle mesure était d’ailleurs incluse, avant d’être finalement retirée, dans la première version de la loi Macron en 2015 !
*Janus Henderson Global Dividend Index 19ème édition (août 2018)
Flash Economie Natixis 937 (31/08/2018) : La croissance de la France est devenue structurellement plus faible que celle du reste de la zone euro : pourquoi ?
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