Le gouvernement a présenté le 31 août les ordonnances sur la réforme du Code du travail dont une large part confirme les craintes exposées par la CFE-CGC durant la phase de concertation avec les partenaires sociaux. Rémunération, licenciements économiques, indemnités prud’homales, fusion des instances représentatives du personnel, ruptures conventionnelles collectives… Décryptage de quelques-unes des principales mesures et de leur futur impact sur les salariés.
Les dés sont jetés. Après avoir réuni conjointement les partenaires sociaux lors d’une ultime réunion de concertation, le gouvernement a présenté, le 31 août dernier, les ordonnances relatives à la réforme du Code du travail. Celles-ci doivent être adoptées le 22 septembre en Conseil des ministres avant publication au Journal officiel.
A mesure de la concertation sociale et durant tout l’été avec sa campagne visant à sensibiliser l’opinion publique, la CFE-CGC n’a cessé de pointer les dangers majeurs induits pour les salariés par “une réforme idéologique sans impact sur l’emploi, une énième réforme libérale qui va accroître la précarité et le dumping social” comme le résume François Hommeril, président confédéral.
“La CFE-CGC a fait part de son mécontentement et de ses inquiétudes, appuie Gilles Lécuelle, secrétaire national. Nous aurions voulu être entendus par le gouvernement sur nos propositions pour favoriser l’entreprise du 21e siècle, mais ça n’a pas été le cas. Aujourd’hui, nous sommes vraiment inquiets.“
CINQ RISQUES MAJEURS INDUITS PAR LA RÉFORME GOUVERNEMENTALE DU CODE DU TRAVAIL
- 1- Prime d’ancienneté et 13e mois : dangers sur la rémunération !
Jusqu’alors, les primes d’ancienneté et le 13e mois – des compléments de salaire souvent importants pour un salarié – relevaient des branches professionnelles avec des accords conventionnels qui en fixent les modalités et les montants. Les ordonnances prévoient que ce seront désormais les entreprises qui pourront négocier (avec les représentants du personnel) le 13e mois et les primes d’ancienneté, sans que la branche puisse apporter la moindre régulation.
Concrètement, une entreprise aura donc la possibilité de revenir sur les primes existantes voire de les supprimer. Le risque d’un dumping social accru est évident. Comme l’explique François Hommeril dans les colonnes de Marianne, « il est facile d’imaginer qu’un chef d’entreprise, sous la pression du marché, pourrait demander à ses salariés de renoncer à des éléments substantiels de leur rémunération. Le moins-disant social devient dès lors la règle”.
- 2- Réduction du périmètre des licenciements économiques et facilitation des plans sociaux
Actuellement, les difficultés financières d’une entreprise qui souhaite licencier pour motif économique sont appréciées à l’échelle internationale, dans tous les pays où elle opère. Dorénavant, seule la situation financière de l’entreprise en France sera prise en compte. Le risque est donc grand de voir se mettre en place des faillites organisées et autres montages complexes destinés à « noircir le tableau » des comptes des filiales françaises…
Autrement dit : une filiale pourra désormais licencier à sa guise dans l’Hexagone pour motif économique, même si l’entreprise est bénéficiaire à l’échelle mondiale. Voilà pourquoi la CFE-CGC s’est toujours prononcée contre cette réduction du périmètre d’appréciation des difficultés économiques, faisant valoir que seules des difficultés importantes et durables doivent justifier un licenciement pour motifs économiques, cela dans le but d’assurer la pérennité de l’entreprise.
- 3- Plafonnement des indemnités prud’homales
Autre dossier brûlant et autre risque accru pour les salariés sous l’effet des ordonnances : le plafonnement des dommages et intérêts versés aux prud’hommes en cas de licenciement abusif. La possibilité est ainsi donnée à l’employeur de connaître « par avance » le coût du licenciement d’un salarié puisque si un salarié est victime d’un licenciement abusif, ses indemnités prud’homales seront dorénavant fixées selon un barème ne tenant pas compte de sa situation personnelle.
Dans le détail, le texte prévoit un plafonnement d’un mois de salaire en-dessous d’un an d’ancienneté et un plafonnement à trois mois de salaire jusqu’à deux ans d’ancienneté. Ce plafond augmente d’un mois par année jusqu’à 10 ans d’ancienneté, puis d’un demi-mois par année au-delà, sans pouvoir excéder 20 mois. De son côté, la CFE-CGC s’est toujours fermement opposée au plafonnement des indemnités prud’homales qui remet en cause le fondement du droit du travail et fragilise les salariés.
A noter également : le délai de saisine des prud’hommes dont disposera un salarié estimant son licenciement illégal va être réduit à 12 mois contre 24 mois actuellement dans la plupart des cas.
- 4- Fusion des instances représentatives du personnel (IRP) et disparition du CHSCT
C’est un des sujets qui a le plus largement cristallisé les critiques envers cette nouvelle loi travail. Sans surprise, le texte entérine, pour les entreprises de plus de 50 salariés, la fusion des instances représentatives du personnel (DP, CE et CHSCT) en une instance unique : le « comité social et économique ». Les modalités et moyens alloués à cette nouvelle entité doivent être précisés lors de la publication des décrets.
Quoi qu’il en soit, pour la CFE-CGC, la disparition du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est une transgression qui jette la suspicion sur l’ensemble de la réforme gouvernementale. Ce sont en effet les élus du CHSCT qui veillent au quotidien sur la santé des salariés au travail (risques professionnels, burn-out, souffrances…). A l’avenir moins nombreux et plus sollicités, les représentants des salariés seront fatalement moins disponibles pour accompagner les salariés.
- 5- Mise en place de ruptures conventionnelles collectives
Comme prévu, la réforme gouvernementale introduit dans le Code du travail la création d’un dispositif de rupture conventionnelle collective. Par accord majoritaire, les entreprises pourront ainsi définir un cadre commun de départs volontaires alors qu’aujourd’hui, ces ruptures à l’amiable ne peuvent être conclues qu’individuellement entre un salarié et son employeur.
Malgré quelques garde-fous – l’accord de rupture conventionnelle collective devra être homologué par l’administration – il est aisé, là encore, d’identifier les risques d’une telle mesure, notamment les plans sociaux déguisés, en particulier vis-à-vis des seniors.
LA CFE-CGC MOBILISÉE DANS LES ENTREPRISES AU SERVICE DES SALARIÉS
Avec ses sections syndicales et ses fédérations, la CFE-CGC continuera d’informer l’opinion sur les risques de désordre social que fait peser cette réforme. “C’est dans les entreprises que la CFE-CGC poursuivra son développement pour soutenir et défendre les intérêts des salariés qui restent la première richesse de l’entreprise”, rappelle également le syndicat de l’encadrement.
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